Comment lutter contre le chômage.
« Le chômage n’est pas une fatalité et j’inverserai la courbe » déclarait François Hollande en 2012. Et pourtant, quelques années plus tard, le président de la République Française fera un constat amer ; la politique de l’emploi poursuivie n’a pas donné les résultats escomptés. S’agit-il alors d’une erreur de politique ? Les forces du marché permettent-elles encore de mettre en place des politiques adaptées pour lutter contre le chômage ? C’est le thème de cet article.
Des notions du programme à connaître (définies dans l’article) : chômage, taux de chômage, sous-emploi, taux d’emploi, chômage involontaire, demande effective, chômage structurel, coût du travail, flexibilité du travail,, appariement, asymétrie d’information et salaire d’efficience,
I. Le manque d’emploi à l’origine du chômage et sous-emploi
A. Les mesures du chômage et le taux de chômage
Petit rappel préalable: le chômage regroupe l’ ensemble des personnes en âge de travailler qui sont privées d’emploi et qui en recherche un.
Les trois caractéristiques du chômage peuvent donner place à des interprétations différentes et c’est pour cela que la mesure du chômage donne des données différentes selon les organismes. En France on retrouve les statistiques de l’INSEE et celles de Pôle Emploi
La mesure des Demandeurs d’Emploi en Fin de Mois (DEFM) par Pôle Emploi
L’organisme public publie tous les mois les 5 catégories de chômeurs inscrits.
Catégorie A : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, sans emploi
Catégorie B : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite courte (maximum 78 heures au cours du mois)
Catégorie C : demandeurs d’emploi tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, ayant exercé une activité réduite longue (plus de 78 heures au cours du mois)
Catégorie D : demandeurs d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi (en raison d’un stage, d’une formation, d’une maladie…), sans emploi
Catégorie E : demandeurs d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, en emploi (par exemple : bénéficiaires de contrats aidés)
Pôle Emploi braque les projecteurs tous les mois sur la catégorie A qui regroupe en novembre 2022 environ 3 000 000 chômeurs.
La mesure INSEE du chômage
Elle se fait grâce à une enquête réalisée pendant une semaine de référence. Elle détermine alors le nombre de chômeurs en reprenant les critères précis du Bureau International du Travail. L’INSEE mesure ainsi la Population Sans Emploi à la Recherche d’un Emploi (PSERE) . Ainsi en 2022, l’INSEE calculait 2,2 millions de chômeurs. (1)
Le saviez-vous
Le Bureau International du Travail
On dit souvent que l’INSEE calcule le chômage (BIT) c’est à dire qu’il reprend la définition internationale du chômage adoptée en 1982 par le Bureau International du Travail (BIT). Pour être considéré comme chômeur, il faut être sans emploi, être disponible, et rechercher activement un emploi. Ainsi, le BIT participe à l’élaboration des normes internationales pour promouvoir les droits du travail et donc pour œuvrer en faveur de la justice sociale.
L’origine du BIT
Mais quelle est l’origine du BIT ou plutôt de l’Organisation Internationale du Travail (OIT)? En effet, le BIT, est le secrétariat de cet organisme basé à Genève et qui réunit actuellement plus de 2700 salariés. L’OIT est une institution spécialisée des Nations-Unis et ce n’est pas un hasard si elle est située à Genève, à deux pas du Palais de Nations, le siège européen des Nations-Unis qui a remplacé en 1946 l’ancienne Société des Nations. Mais revenons à l’ OIT! Cette organisation qui œuvre pour les droits fondamentaux au travail, pour le droit à un travail décent, pour une protections sociale pour tous, et pour le dialogue social, est le fruit d’une longue histoire qui prend ses sources au milieu du XIXe siècle, grâce aux idées pionnières de deux industriels fervents défenseurs de la justice sociale; le gallois R. Owen et le français, d’origine suisse, D. Legrand.
Focalisons maintenant sur le taux de chômage. La formule du taux de chômage d’une population considérée est :
(chômeurs de la population considérée / nombre actifs de la population considérée ) x 100
Cette variable relativement simple est pourtant à l’origine d’erreurs relativement fréquentes des élèves. Par exemple, si un tableau statistique nous présente un taux de chômage des jeunes de 25%, l’erreur fréquente est de dire qu’un quart des jeunes est au chômage. On oublie alors en que le chômage se calcule par rapport aux actifs, autrement dit aux personnes qui cherchent à travailler, ce qui exclut les lycéens et étudiants de plus de 16 ans. La signification exacte du chiffre est donc ; sur 100 jeunes actifs, 25 sont au chômage ou encore, un quart des jeunes actifs sont au chômage. Ce qui est moins alarmant mais cependant encore beaucoup trop élevé !
B. A la frontière du chômage : le sous-emploi
Le chômage n’est qu’une partie du problème du manque d’emploi, il existe aussi le sous emploi mais aussi certaines formes d’inactivités qui forment le halo du chômage. Par exemple, des chômeurs découragés ne recherchent plus d’emplois, ils sont donc théoriquement inactifs. Idem pour des chômeurs à la veille de la retraite et qui ne cherchent plus un nouveau travail.
Finalement, on constate avec le sous-emploi, que le taux de chômage ne reflette pas parfaitement les problèmes du marché du travail. De plus, les types de calcul du taux de chômage peuvent sensiblement modifier les résultats. C’est pourquoi depuis peu, les économistes de l’OCDE, préfèrent comparer les marchés de l’emploi dans les différents pays, en prenant en compte le taux d’emploi
C. Un indicateur de plus en plus utilisé : le taux d’emploi
Le taux d’emploi permet de mesurer les personnes disposant d’un emploi parmi la population en âge de travailler. Cet indicateur montre réellement la capacité du pays à mettre en activité la population. On peut de plus distinguer des sous-types de population : le taux d’emploi des jeunes, le taux d’emploi des femmes… A toi de t’entraîner à faire les bonnes phrases avec les documents statistiques de l’INSEE.
Année | France-Ensemble | France-Homme | France-Femme | UE-27 |
---|---|---|---|---|
2015 | 64,7 | 67,4 | 62,1 | 64,1 |
2016 | 65,0 | 67,8 | 62,4 | 65,2 |
2017 | 65,6 | 68,6 | 62,6 | 66,4 |
2018 | 66,1 | 69,1 | 63,3 | 67,3 |
2019 | 66,4 | 69,0 | 63,8 | 68,1 |
2020 | 66,1 | 68,7 | 63,6 | 67,0 |
2021 | 67,2 | 70,1 | 64,5 | 68,4 |
- Champ : personnes de 15 à 64 ans, Union européenne à 27 pays, France (hors Mayotte)
- Source : Labour source survey , Eurostat (extraction 14 juin 2022 ; Insee, enquête Emploi 2021 et séries longues sur le marché du travail pour la France.
Que signifie 67,2 ? Selon l’ INSEE, en France en 2021, sur 100 personnes de 15 à 64 ans, 67,2 avaient un emploi
Ce document nous montre ainsi que le taux d’emploi augmente en France ces dernières années. De plus, il est toujours plus élevé pour les hommes que pour les femmes. Si tu t’intéresse à l’actualité, tu comprendras aisément pourquoi le chiffre augmente. Comme tu le sais, les départs à la retraite sont repoussés par des mesures politiques visant à employer plus longtemps les actifs.
Mais revenons au chômage. Pourquoi certains pays comme le Canada par exemple connaissent des pénuries de main d’œuvre, alors que d’autres pays de l’OCDE ont des taux de chômage relativement élevés ? Les causes sont multiples
II. Le chômage conjoncturel et les politiques adaptées
A. Le chômage conjoncturel est un chômage involontaire
Avec la crise économique actuelle il n’est pas difficile de comprendre que la conjoncture joue un rôle essentiel, dans l’évolution du taux de chômage. Lorsque la crise économique affecte le pouvoir d’achat des ménages, cela limite bien évidemment la consommation. On dit plus précisément la consommation finale des ménages. Plu globalement, le manque de demande globale créée un déséquilibre. La demande globale est une notion déjà vue en première qui correspond à la consommation finale des ménages, l’investissement (dans l’investissement on peut distinguer l’investissement des entreprises et l’investissement public) et les exportations nettes (exportations – importations).
Le chômage est donc involontaire. Il est lié à une insuffisance de la demande de biens et des services à cause d’une crise voire d’une dépression comme après 1929. Face à ce constat, les entreprises ont moins de confiance dans l’avenir. A cause de ces projections incertaines elles vont limiter les investissements. Selon John Maynard Keynes (1883-1946), le fameux économiste anglais à l’origine de la macroéconomie, les embauches sont liées à la demande effective . Cette dernière correspond à la demande de biens de consommation et de production anticipée par les producteurs. Si les entreprises anticipent une stagnation, voire une baisse de la demande, alors il y a peu d’investissement et peu d’embauches. Il peut donc exister un équilibre de sous-emploi qui nécessite l’intervention de l’État. Alors, que faut-il faire ?
B. Les politiques keynésiennes de lutte contre le chômage involontaire
L’ État peut intervenir par une politique budgétaire, une politique monétaire adaptée ou encore une politique de redistribution des revenus.
La politique budgétaire
La politique budgétaire est une politique liée au budget de l’ État. Ainsi il peut adopter une politique de relance en favorisant notamment les dépenses publiques. L’exemple canonique est la politique des Grands Travaux, le New Deal, initié par Franklin Delano Roosevelt entre 1933 et 1938 pour combattre les conséquences désastreuses du krach de 1929. Par contre, ne faisons pas un anachronisme. Le livre de Keynes, La Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie, date de 1936 et n’a donc pas inspiré directement les politiques économiques américaines.
La politique monétaire
Il faut reprendre les connaissances développées en première. Nous rappellerons que cette politique conjoncturelle vise à agir sur la situation économique en variant la masse monétaire en circulation. Par exemple, si la Banque européenne cherche à relancer l’économie elle peut favoriser la création monétaire par les banques de second rang en diminuant le taux d’intérêt directeur. Inversement en cas de surchauffe (c’est un souvenir plus lointain en Europe) la BCE remontera le taux d’intérêt.
La politique de redistribution des revenus
Pour comprendre ce point, il faut se remémorer le concept de propension à consommer développé par Keynes dans son livre – chapitre – 3 de son célèbre ouvrage. La propension (moyenne) à consommer c’est tout simplement le rapport entre la consommation et le revenu (en %). Par exemple une propension moyenne à consommer de 85% signifie qu’en moyenne les ménages consomment 85% de leurs revenus. Or tu conçois que les plus pauvres ont une consommation à consommer plus importante alors que les plus riches se permettent une propension à consommer plus basse puisqu’ils peuvent plus épargner. Voici alors, pourquoi selon Keynes l’Etat doit intervenir: grâce à une redistribution des revenus grâce à un prélèvement plus important des classes favorisées et une redistribution sous forme de revenus de transfert aux classes défavorisées, la consommation et l’investissement immobilier va augmenter ce qui ne peut que favoriser la demander effective et donc la création d’emplois (ce raisonnement perd de sa pertinence en économie ouverte – ce qui est le cas aujourd’hui dans un monde avec peu de frontières – car l’augmentation de la demande peut se diriger vers des importations massives sans avoir l’impact attendu au niveau national).
On peut cependant aussi considérer que le chômage est structurel.Il faudra mettre en place d’autres types de mesures.
III. Le chômage structurel et les politiques adaptées
B. Un chômage structurel lié aux rigidités du marché du travail
Le chômage structurel est lié à des problèmes structurels de l’économie. Cela peut-être lié à des rigidités sur le marché du travail mais aussi à des problèmes d’appariement entre l’offre et la demande de travail.
Analysons tout d’abord, le problème de la rigidité du marché du travail
Un marché du travail rigide
Le marché est rigide lorsque les prix et les quantités ne s’ajustent pas, comme tu l’as vu en première dans le modèle économique de base du marché de l’offre et de la demande. En effet, le marché du travail est régulé par l’État et il y a de nombreuses règles qui encadrent ce marché pour protéger les travailleurs. Il en est ainsi du salaire minimum qui oblige toutes les entreprises à ne pas proposer un salaire inférieur au seuil fixé par l’État. Il existe aussi de nombreuses mesures sociales, qui obligent les entreprises à verser les cotisations sociales. C’est un atout, qui est le fruit de longues luttes des travailleurs pour s’extirper de l’exploitation telle qu’il a été vécu au XIXe siècle. Néanmoins, les coûts du travail sont plus élevés et cela diminue donc la compétitivité des entreprises face aux autres pays. Ainsi, les libéraux prônent des politiques de flexibilité du travail
La flexibilité du travail
C’est une situation ou le salaire réel et la quantité de travail s’ajustent à la conjoncture économique. Ainsi, si l’économie se porte bien les entrepreneurs pourront embaucher et les salaires réels auront tendance à augmenter. Mais dans le cas inverse, les entrepreneurs devraient pouvoir varier le nombre de travailleurs. On peut alors retrouver des mesures visant à limiter la hausse du salaire minimum. Mais en France, les mesures ont largement porté sur la volonté de réduire le coût du travail. En effet, on sait qu’au delà du salaire brut versé par l’employeur, les charges sociales voire les primes augmentent d’une façon conséquente le coût du travail. l’Etat pourra alors favoriser la baisse des charges sociales supportées par les employeurs. Cela s’est fait dans plusieurs pays, notamment sur les bas salaires pour inciter à l’embauche.De même des allocations chômage trop généreuses, rigidifient le marché du travail. En effet, l’offreur de travail qui vient d’être licencié, va rationnellement augmenter son temps de recherche. Il pourra en effet, bénéficier dans un premier temps des cotisations chômage versées. La théorie du « job search » montre ainsi que si le travailleur licencié peut bénéficier d’indemnité chômage pendant un temps certain, il augmentera ainsi son temps de recherche d’emploi. En effet, face à un marché du travail incertain, le chômeur souhaite sécuriser son choix quitte à prendre plus de temps.
Nous avons ci-dessus, les mesures libérales visant à limiter l’action de l’Etat mais aussi des syndicats, qui rigidifient le marché du travail. Mais dans les années quatre-vingt, certains économistes ont montré que les entreprises elles-mêmes pouvaient proposer des salaires plus élevés que le salaire d’équilibre. Ce faisant, elle déstabilise le marché et crée, sans le vouloir, un chômage structurel. Analysons cela ci-dessous
C. Les asymétries d’information et le salaire d’efficience
Pourquoi une entreprise verserait-elle un salaire plus élevé que ce que permet le marché ?
………………………..A FINIR …………………………………
→ rappel sur les asymétries d’information de première page 82
les élèves doivent être capable d’illustrer le risque de sélection adverse sur le marché adverse et d’aléa moral
Pour éviter la sélection adverse (doc 2 page 82) ou l’aléa moral (doc 3 page 83) les entreprises proposent un salaire d’efficience .
Mais le problème est que ce salaire d’efficience créé le chômage structurel (doc 4 page 83)
Au delà de la rigidité du marché du travail, le chômage structurel peut être lié à des problèmes d’appariement entre offre et demande.
D. Un chômage structurel lié à des problèmes d’appariement entre offre et demande de travail
L’appariement n’est pas un terme que l’on emploie dans les conversations quotidiennes. Aussi, nous allons préciser qu’il s’agit de l’adéquation entre offre et demande. Donc les problèmes d’appariement, sont des inadéquations des offreurs de travail autrement dit, les travailleurs. Cela peut être lié à un manque de compétence ou bien à un problème spatial. Ainsi chaque année, des entreprises n’arrivent pas à recruter des travailleurs qualifiés en informatique, sur des chantiers. Les travailleurs n’ont pas les qualifications requises pour répondre pleinement au poste. Il est aussi possible que la situation géographique de l’entreprise qui demande le travail ne convienne pas. Il sera ainsi plus difficile d’attirer des travailleurs qualifiés dans des régions plus reculées.
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MAJ février 2022 @Philippe Herry
(1) Lafinancepourtous chiffre du chômage