Quelles mutations du travail et de l’emploi Selon la théorie du déversement, les emplois perdus dans les secteurs primaire ou secondaire à cause du progrès technique sont compensés par d’autres emplois créés dans le tertiaire. Mais avec une robotisation accrue, l’intelligence artificielle, le numérique… cela restera-t-il vrai ? Après avoir fait des constats sur les mutations du travail, nous poserons cette question de l’intégration sociale par l’emploi qui pourrait être remise en cause. Au passage, nous allons retrouver les différentes formes d’organisation du travail en passant du taylorisme au post-taylorisme.
Les notions du programme à connaître : actif, emploi, salarié, chômeur, halo du chômage et taux de chômage, qualité des emplois, taylorisme, fordisme, post-taylorisme, néo-taylorisme, télétravail, polarisation des emplois, précarisation de l’emploi, emploi et intégration sociale.
I. Entre l’emploi, le chômage et l’inactivité
A. Activité, emploi et travail
Es-tu capable de bien distinguer la notion de travail et d’emploi ?
Le travail est socialement organisé
Le travail est une activité socialement organisée qui permet de produire et d’entretenir des biens et des services. On comprend dès lors que les formes de travail sont diverses puisqu’elles dépendent de la société. Ainsi, le travail forcé, comme l’esclavage ou la corvée, qui pouvait être la norme au temps des Grecs ou encore pendant le Moyen Âge, est totalement prohibé par les normes internationales. De la même façon, le travail domestique non rémunéré a été pendant des millénaires la norme socialement acceptée dans un monde essentiellement agricole où la fonction essentielle de la famille était une fonction de production. Il semblait alors évident que, dès le plus jeune âge, tout le monde contribuait par son travail à la production familiale. Cette façon de concevoir le travail est d’ailleurs encore largement répandue dans les pays plus pauvres, où il va de soi que chaque membre de la famille doit se mettre au service de l’économie domestique.
L’emploi : un travail rémunéré
Il en va tout autrement avec
l’emploi qui correspond, selon la définition simple donnée par l’économiste Jacques Freyssinet, au travail rémunéré et déclaré. Les institutions ont alors normalisé les règles d’emploi. On distingue ainsi l’emploi typique qui correspond à l’emploi en contrat de travail à durée indéterminée (CDI) et l’emploi atypique pour toutes les autres formes particulières d’emploi. Parmi les statuts d’emploi, on devra distinguer l’emploi non salarié, qui a été supplanté dans les pays développés par l’emploi salarié. Nous rappellerons que le salariat est un rapport social défini entre l’employeur et l’employé dans le cadre d’un contrat de travail. Or la salarisation est un des processus qui se met en place avec le développement de la société. Par exemple, en France, environ 90 % des emplois sont salariés. On voit cependant apparaître avec l’Uberisation de la société, de nouvelles formes d’emploi. Les travailleurs non-salariés ont alors le statut d’autoentrepreneurs et à ce titre sont exploités par les plateformes numériques donneuses d’ordre. Pour autant, les politiques agissent en Europe et, depuis peu, les emplois liés à des plateformes et des algorithmes sont plus protégés.
Pour terminer ce premier point, jetons un regard sur la notion d’activité et de chômage.
Les actifs et les chômeurs
La population en âge de travailler, les personnes qui ont entre 15 et 65 ans, représente environ 41 millions de personnes aujourd’hui en France. Parmi ceux-ci, il y a presque 30 millions d’actifs et d’actives. Comme tu sais les actifs sont les personnes qui travaillent ou qui cherchent à travailler. Or, avec l’allongement des durées d’étude, il y a moins de jeunes actifs en-dessous de 21 ans, notamment. Malheureusement, on compte parmi ces actifs 2,3 millions de chômeurs environ (chiffre de 2023). Un chômeur est un actif sans emploi. Attention à ne pas faire l’erreur classique, qui consiste à confondre les inactifs et les chômeurs. Les inactifs ne cherchent pas à travailler.
D’autre part, le taux de chômage mesure la part des chômeurs parmi les actifs. Calcule alors le taux de chômage et fais la phrase appropriée ! ( tu vérifieras à la fin du chapitre).
Le taux d’emploi qui mesure la part des actifs occupés sur la population en âge de travailler est donc de 66 % environ. (Je te laisse retrouver le calcul de répartition 🙂 )
B. Le brouillage des frontières entre emploi, chômage et inactivité
L’emploi en CDI est la norme en France, et la grande majorité des salariés travaillent avec ce type de contrat. Pour autant, les autres formes d’emplois atypiques et notamment le CDD augmentent chaque année et il est proposé de plus en plus aux jeunes et bien sûr pour un premier emploi.
De plus, on voit apparaître alors une catégorie de travailleurs précaires qui oscille entre emploi peu qualifié et chômage, voire même inactivité. On voit ainsi que les frontières entre l’emploi et le chômage se brouillent. C’est ce qu’on appelle le halo du chômage. Il désigne donc les personnes qui ne correspondent pas précisément aux caractéristiques du chômeur définies par le Bureau international du travail (BIT), mais qui gravitent autour du chômage. Cela comprend ainsi les chômeurs découragés par la situation du marché de l’emploi, qui se déclarent chômeurs, mais ne recherchent pas véritablement un nouvel emploi. Cela comprend aussi les personnes qui alternent petits boulots et chômage.
II. La qualité de l’emploi : une approche multidimensionnelle
A. Les critères de la qualité des emplois
Même si tu n’as pas encore commencé à travailler, tu es capable de donner plusieurs critères qui permettent d’indiquer le niveau de qualité d’un emploi. On retrouve pèle-mêle ; le niveau de salaire et sa régularité, la sécurité en cas de perte d’emploi, l’horizon de carrière, la formation continue dont on peut bénéficier, la variété des tâches, le stress occasionné par le travail, la dangerosité du métier, les relations entre collègues… L’OCDE retient trois critères clés de la qualité de l’emploi : la qualité du revenu, qui comprend le montant, mais aussi la répartition dans la population active, la sécurité de l’emploi, notamment face à la perte possible de l’emploi, et la qualité de l’environnement du travail, donc les relations, le stress…
Or, comme tu le sais, les inégalités vis-à-vis de la qualité de l’emploi sont marquées selon les catégories sociales. Tu dois t’entraîner pour étudier des documents appropriés sur cette question.
B. Des inégalités dans la qualité des emplois entre les cadres et les employés
Les cadres connaissent objectivement une meilleure qualité de l’emploi ce qui se définit par les qualités requises pour le poste de travail. Il bénéficie alors d’avantages substantiels. Au delà de la rémunération en moyenne plus élevée, ils bénéficient en plus de formation continue plus régulièrement, ce qui leur permet d’évoluer dans leurs carrières plus facilement. Le travail est aussi plus souvent considéré comme moins routinier et moins pénible. De plus, dans notre société actuelle, il est plus souvent socialement valorisé.
III. Du taylorisme au post-taylorisme
A. La division du travail
En 1776, dans son premier chapitre de La richesse des nations, Adam Smith nous présente les bienfaits de la parcellisation des tâches à travers l’exemple célèbre d’une manufacture d’épingles. Je te conseille de lire l’extrait à la fin de l’article. C’est un des paragraphes les plus connus en économie (1) 🙂 Adam Smith nous montre ainsi que la parcellisation des tâches décuple la productivité de chacun, puisque chacun ne se concentre que sur une tâche élémentaire, ne perd donc pas de temps et même maîtrise de mieux en mieux sa tâche. Cela entraine des répercussions positives en chaîne ; plus de profits réalisés, possibilité de distribuer plus de salaires aux ouvriers, baisse éventuelle des prix des biens produits, ce qui a des conséquences sur le pouvoir d’achat et induit alors une hausse de la demande dans d’autres domaines avec tous les effets vertueux que cela engendre.
Le saviez-vous ?
Adam Smith, un plagiaire ?
Le fameux exemple de la manufacture d’épingles que l’on retrouve dans les premières lignes de son célèbre ouvrage illustre l’idée que la division du travail accroît la productivité. Cette idée était fort répandue à l’époque et A. Smith a puisé dans de nombreuses sources, dont vraisemblablement l’encyclopédie de Diderot et d’Alembert.
B. Le taylorisme
Éviter la flânerie des ouvriers
Bien des années plus tard, l’ingénieur américain Taylor (1856/1915) va mettre au point l’Organisation Scientifique du Travail (OST) qui va bouleverser la façon de travailler par la suite. Taylor a commencé comme apprenti ouvrier, et avec une volonté d’ambition va poursuivre sa carrière jusqu’à devenir ingénieur grâce aux cours du soir. Il connait donc bien la façon de travailler des ouvriers, et il va s’efforcer d’éviter la ‘flânerie des ouvriers’ pour reprendre ses propos. L’OST décrit la double division du travail. La division horizontale du travail marquée par une parcellisation des tâches, à l’instar de la description ci-dessus dans la manufacture d’épingles. De plus, les encadrants vont chronométrer les tâches pour montrer la cadence à atteindre.
Le taylorisme s’exporte dans le monde entier.
D’autre part, Fredrick Taylor décrit la division verticale du travail, c’est-à-dire une séparation entre la conception et l’encadrement des tâches et l’exécution des tâches. Tous les effets positifs déjà décrits par Adam Smith au siècle précédent vont se réaliser. Par contre, l’ouvrier va être dépossédé de son autonomie de travail, mais un système de prime est censé compenser les aspects négatifs. Le succès du taylorisme est immédiat et s’exporte dans le monde. Taylor viendra exposer la nouvelle organisation du travail pendant l’Exposition universelle à Paris en 1900. Face aux effets positifs sur les rendements, de nombreux entrepreneurs et ingénieurs vont alors appliquer cela en France et dans les pays voisins. Avec la Première Guerre mondiale et la nécessité d’accroître les cadences pour livrer les armées, le taylorisme va se développer à grande échelle.
C. Le fordisme ; une organisation du travail, mais aussi un système
L’organisation fordiste du travail
Henri Ford (1863-1947) va reprendre le taylorisme à son compte et le perfectionner, jusqu’à inventer une nouvelle organisation du travail, le fordisme, qui devient également un nouveau système. Henri Ford est un ingénieur et c’est en visitant les abattoirs de Chicago qu’il va découvrir les convoyeurs. Il va alors souhaiter développer ce mécanisme dans l’usine qui fabrique la Ford T à Detroit. C’est le fameux travail à la chaîne. Chaque ouvrier est posté sur une ligne de travail et ne doit réaliser qu’une seule tâche d’assemblage. L’ensemble permet alors de produire une voiture en moins d’une heure et demi. Les profits sont immenses.
Le système fordiste
Mais Ford ne s’arrête pas là. Il met en place ce qu’on appelle le système fordiste. En effet, son idée est d’augmenter les ouvriers pour qu’ils puissent avoir suffisamment de ressources par la suite pour devenir de futurs acheteurs. En 1914, il décide de doubler le salaire horaire des ouvriers avec le Five dollar’s day qui va attirer beaucoup de candidats. Le succès est grandissant, les usines Ford s’implantent à l’étranger. En 1932, Ford construit une voiture sur trois dans le monde. D’autre part, l’organisation fordiste du travail va être reprise dans tous les secteurs. Cette innovation majeure de l’organisation du travail sera à l’origine de l’augmentation grandissante des gains de productivité dont bénéficieront les ouvriers et l’économie dans son ensemble grâce à l’élévation des revenus.
L’aliénation des travailleurs
Mais ce tableau qui parait idyllique a pourtant sa part d’ombre. Le travail répétitif demandé n’est pas supportable et l’absentéisme grandit. Le turnover, c’est-à-dire le changement d’entreprises des ouvriers, est important. Face à cette aliénation du travail subie par les ouvriers dans ce système capitaliste, les revendications se multiplient et les grèves augmentent. C’est dans ce contexte qu’un nouveau modèle va naître, le toyotisme.
D. Le toyotisme
À l’origine l’ingénieur Ohno de Toyota.
Cette nouvelle organisation du travail est attribuée à l’ingénieur Ohno qui la met en pratique dans les usines Toyota au Japon. Il prend le contrepied du modèle fordiste. Chaque ouvrier est incorporé dans des petites équipes qui sont responsables d’une partie de la production. La polyvalence des tâches est souhaitée et la participation de l’ouvrier à l’amélioration de la méthode de fabrication est vivement encouragée. Ohno invente de nouvelles méthodes.
Les principes nouveaux
-> juste à temps (just in time) On réduit les gaspillages en produisant juste ce qu’il faut sans stocker.
-> Le kanban C’est une méthode de flux tendu. C’est-à-dire que ceux qui distribuent les produits savent exactement la quantité que l’entreprise doit produire. Ils font donc remonter l’information en aval qui ne produira alors que ce qu’il faut. Le kanban, c’est la fiche qui était utilisée autrefois pour la remontée de l’information.
-> le kaizen. En japonais, cela signifie ‘amélioration’. C’est un esprit d’équipe ouvert sur le partage d’idées nouvelles pour améliorer constamment la façon de travailler. Cela part du principe que celui qui réalise l’activité est le mieux placé pour faire part de ses idées pour améliorer le processus de production.
Mais le taylorisme n’est pas mort.
Pourtant, le taylorisme n’est pas mort. Il a une grande capacité de résilience, notamment à travers les services. On le retrouve dans les call-centers, ou bien dans la restauration rapide et bien d’autres services. Le travail est fondé sur les principes tayloriens. Encadrement, parcellisation des tâches, séparation entre les cadres dirigeants et les techniciens qui exécutent les demandes. On appelle cela le néo-taylorisme. C’est donc les techniques de Taylor appliquées au monde moderne dans les services. À ne pas confondre avec le post-taylorisme, qui correspondait notamment au toyotisme !
IV. Le numérique brouille les frontières du travail
Le numérique traduit toutes les activités liées à l’informatique, Internet, la télécommunication. Cela permet de nouvelles façons de travailler.
L’expansion du télétravail
En dehors du lieu de travail, le télétravail c’est-à-dire le travail à distance. Le travail dans des tiers-lieu, autrement dit des lieux où se regroupent des indépendants, des freelances avec un smartphone ou une liaison Internet, se multiplie. C’est le coworking. Le télétravail amène de nouvelles problématiques puisque la frontière entre le travail et la vie personnelle, le hors travail, se réduit.
La désintermédiation des emplois
D’autre part, le numérique augmente la désintermédiation des emplois, c’est-à-dire que les entreprises qui ont besoin de services vont trouver directement via le numérique et sans intermédiaire les personnes qui vont répondre à leurs demandes. Ainsi, dans le domaine de la traduction, cela s’est largement désintermédié. Les grandes entreprises qui ont besoin de faire traduire leurs campagnes de publicité, leurs contrats… avaient l’habitude de sous-traiter ce travail à des entreprises spécialisées. Cela n’est plus nécessaire. Des freelances font le travail directement. C’est plus rapide et moins cher.
La polarisation des emplois
C’est la question de la substitution ou complémentarité. Les travailleurs qui œuvrent pour les tâches répétitives, codifiables et automatisables vont être remplacés.
V. L’emploi : un rôle d’intégration sociale en équilibre précaire
Historiquement, l’emploi n’était pas pensé comme une possibilité d’intégration sociale. Les nobles d’autrefois ne devaient pas travailler, mais se consacrer aux tâches nobles, la guerre, les affaires de l’État, les lettres, l’art… Le modèle bourgeois du XIXe siècle a placé le travail au centre de la richesse, mais il s’agissait alors d’une exploitation du travail des prolétaires. Le travail comme norme de vie qui fait consensus n’est qu’une invention relativement récente. En effet, dans nos sociétés, l’emploi, autrement dit, le travail rémunéré et déclaré, salarié ou non salarié, permet l’intégration sociale. On peut définir l ‘intégration sociale comme le partage de valeurs et de normes dominantes de la société. Les individus sont alors reliés par des liens sociaux.
A. L’emploi permet l’émancipation grâce au revenu.
L’emploi nous fournit des revenus.
Le travail permet notamment d’obtenir les revenus économiques qui nous permettent de nous intégrer dans la société de consommation. Nous choisissons nos normes de consommation ou on nous impose des normes de consommation, mais nous nous y intégrons grâce à nos revenus économiques en grande partie.
L’emploi nous donne un statut.
Au-delà, comme l’a présenté le sociologue français Robert Castel, le travail nous donne un statut qui nous donne accès à un large filet de protection sociale. Notre retraite va en dépendre après une longue vie de cotisation. À ce stade, en terminale, tu es capable de distinguer les pays qui ont mis en place des systèmes de retraite par capitalisation et les autres qui ont basé le système de retraite sur la répartition. La protection face aux risques de la vie est assurée par les allocations dont on peut le cas échéant profiter. Risque de maladie, risque de chômage, d’accidents du travail, etc.
L’emploi au cœur du système de solidarité
Au-delà de l’aspect économique, le travail assure notre place dans la société moderne. C’est une des idées développées en première concernant la solidarité organique, le concept d’Émile Durkheim. Tu t’en souviens ?
B. Le travail a un rôle social dans les sociétés modernes.
Le travail cadre notre vie et impose un rythme qui devient une norme qui nous relie les uns aux autres. Par exemple, on voit se développer les after-work à la mode anglo-saxonne. La valeur travail est valorisée dans nos sociétés modernes et est à peine remise en cause par les slogans plutôt corrosifs des années hippies comme : « Le travail, c’est la santé ! Ne rien faire, c’est la conserver ». Merci Henri Salvador. De plus, sociologiquement parlant, le travail à travers le statut social qu’il nous impose nous donne une identité sociale. Pour terminer, on rappellera que le travail permet la sociabilité. On illustrera cela par exemple en rappelant par exemple que le choix du conjoint ne se fait principalement pas autour des réseaux sociaux, mais en majorité avec les relations de travail.
Or les mutations du travail viennent transformer cette intégration sociale par le travail.
C. La précarisation du travail à l’origine de l’exclusion
La précarisation du travail ne permet plus les ressources économiques. Ainsi, un travail non qualifié à temps partiel ne permet plus d’obtenir un revenu de subsistance minimum dans nos sociétés. Les individus sans travail n’ont pas d’identité professionnelle et peuvent se sentir exclus des normes sociétales. De plus, la sociabilité est moins évidente lorsque l’emploi n’est pas continu. Les nouvelles façons de travailler, en télétravail, en coworking… vont devoir inventer de nouvelles façons de créer du lien social. Quant aux plateformes, comme Uber, qui créent un vide juridique autour d’autoentrepreneurs qui dépendent d’un même employeur numérisé, les pays européens ont légiféré pour ne pas permettre l’exploitation et l’exclusion des travailleurs des normes typiques associées au travail.
Annexe
(1) La manufacture d’épingles dans De la division du travail, Adam Smith, 1776
Une manufacture d’épingles
Prenons un exemple dans une manufacture de la plus petite importance, mais où la division du travail s’est fait souvent remarquer : une manufacture d’épingles. Un homme qui ne serait pas façonné à ce genre d’ouvrage, dont la division du travail a fait un métier particulier, ni accoutumé à se servir des instruments qui y sont en usage, dont l’invention est probablement due encore à la division du travail, cet ouvrier, quelque adroit qu’il fût, pourrait peut-être à peine faire une épingle dans toute sa journée, et certainement il n’en ferait pas une vingtaine.
Des opérations séparées
Mais de la manière dont cette industrie est maintenant conduite, non seulement l’ouvrage entier forme un métier particulier, mais même cet ouvrage est divisé en un grand nombre de branches, dont la plupart constituent autant de métiers particuliers. Un ouvrier lire le fil à la bobine, un autre le dresse, un troisième coupe la dressée, un quatrième empointe, un cinquième est employé à émoudre le bout qui doit recevoir la tête. Cette tête est elle-même l’objet de deux ou trois opérations séparées : la frapper est une besogne particulière; blanchir les épingles en est une autre; c’est même un métier distinct et séparé que de piquer les papiers et d’y bouter les épingles; enfin l’important travail de faire une épingle est divisé en dix-huit opérations distinctes ou environ, lesquelles, dans certaines fabriques, sont remplies par autant de mains différentes, quoique dans d’autres le même ouvrier en remplisse deux ou trois. »
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Mise à jour juin 2024 @ Philippe Herry
Correction concernant le taux de chômage
Le taux de chômage est de 7,6 % (2,3/30 x100), autrement dit, sur 100 actifs, il y a 7,6 chômeurs.
Réponses concernant le QCM