Finalement, même si nous n’en avons pas conscience, nos actions quotidiennes sont en réalité influencées, conditionnées, déterminées par des apprentissages sociaux.
Les concepts essentiels du thème (définis dans cet article) : socialisation, socialisation primaire et secondaire, valeurs et normes, habitus, agent de socialisation, genre, stéréotype, rôle.
I. Le processus de socialisation
A. Les étapes de la socialisation
Assimiler avec son entourage
Par exemple, le père souhaite que son petit enfant finisse son assiette. Il peut alors se comporter de trois façons différentes :
Imitation : le père va finir son assiette pour que son enfant l’imite.
Injonction (des règles) : le père donne un ordre à l’enfant.
Interaction par le dialogue, l’écoute,… le fils va comprendre qu’il faut finir son assiette.
À travers trois registres différents, le fils va alors saisir l’importance de la norme : finir sa soupe qui correspond à la valeur respect de la nourriture, de la nature.
L’intériorisation des éléments culturels ou l’accommodation
L’adaptation de la personne à son environnement social
Petit complément.
B. … mais comment se forme la personnalité?
La notion de socialisation nécessite de bien comprendre les deux concepts de valeurs et normes
Les valeurs correspondent aux idéaux auxquels adhèrent les membres d’une communauté alors que les normes sont les règles de conduite en société
Exercice
des valeurs |
des normes |
le respect d’autrui la liberté l’égalité la solidarité la charité l’honnêteté l’austérité le respect de la nature l’humilité la sagesse le travail le courage la fidélité la loyauté le dévouement la discipline la générosité le civisme le patriotisme la piété l’oisiveté la compétition l’hospitalité la tolérance la curiosité, la culture, le savoir la séniorité la hiérarchie le progrès |
ne pas voler ne pas mentir payer ses impôts exercer son droit de vote obéir à ses supérieurs hiérarchiques savoir recevoir l’étranger aider son prochain en difficulté ne pas tuer reconnaître ses erreurs s’engager en cas de guerre savoir recevoir l’étranger suivre le culte religieux se marier ne pas commettre de délation ne pas tromper son conjoint ne pas se plaindre ne pas tricher rester maître de soi ne pas jouer de l’argent ne pas faire d’heures supplémentaires dénoncer le coupable d’un délit prendre soin de ce qu’on nous prête laisser sa place aux personnes âgées faire ses devoirs ne pas se moquer, ne pas insulter ne pas se vanter ne pas juger autrui demander conseil aux plus âgés |
Les classements sont liés à nos propres interprétations et peuvent donc être sujet à discussion
Questions (corrigé à la fin)
1) quelles sont les valeurs qui vous apparaissent comme étant complémentaires? (3 exemples)
2) quelles sont les valeurs qui vous apparaissent comme étant contradictoires? (3 exemples)
3) associez des valeurs et des normes qui correspondent.
Quels sont les agents qui nous transmettent les valeurs et les normes? Quelles sont les institutions qui nous socialisent?
II. Les agents de la socialisation
A. La famille
B. L’école
C. Le groupe des pairs
Le groupe des pairs est un terme employé en sociologie pour désigner les relations choisies basées sur l’amitié. C’est les copains et copines, la bande, notamment à l’adolescence. Ce qui caractérise les groupes des pairs, c’est qu’il s’agit de relations chargées d’émotions, parfois de passions. D’autre part, ils prennent une place qui prend une grande importance à l’adolescence, avant de se stabiliser avec la relation de couples qui peut s’instaurer plus tard. Les valeurs et les normes se construisent dans une dynamique relationnelle. Pour repérer le poids des groupes des pairs sur les individus, il faut analyser les interactions sociales qui se construisent entre eux. Les individus, les jeunes, sont alors confrontés à de nouvelles valeurs, normes, qui vont modifier leur personnalité, transformer les identités sociales.
L’influence des groupes des pairs peut susciter des craintes face à l’apparition des bandes, de nouvelles normes déviantes, etc. Le cinéma a repris le sujet bien des fois. Pour ne reprendre que les classiques, on retrouve notamment L’équipée sauvage, La fureur de vivre, West Side Story (je compte sur toi pour compléter ma liste avec tes références en commentaire 🙂 ). Pour autant, on peut aussi considérer que les nouvelles amitiés sont les prolongements des attentes des adolescents qui ont déjà intériorisé certaines valeurs et normes au sein de la famille, notamment.
D. Les médias
Les médias représentent tous les moyens de communication écrits, visuels, sonores, audiovisuels. Cela comprend donc la presse, la radio, la télévision, le cinéma, les sites Internet, voire les jeux vidéo en réseaux sociaux.
Comme le montrent les enquêtes régulières, les médias et principalement par l’intermédiaire d’un écran prennent une place de plus en plus importante. Les médias traditionnels comme la télévision continuent à être le média principal, partagé ou moins partagé, mais les nouveaux médias via Internet prennent une place de plus en plus conséquente. Indubitablement, les médias sont porteurs de valeurs, de normes qui influencent l’individu. Cela soulève de nouvelles questions sur la place des médias qui viennent concurrencer la socialisation traditionnelle par la famille ou l’école.
Des inquiétudes s’expriment à travers des débats sociétaux sur la violence à l’écran, la pornographie accessible à tout âge, le harcèlement vécu par écran interposé. L’inquiétude se fait sentir particulièrement vis-à-vis des jeunes en construction, et qui subissent des influences non contrôlées par les parents. En effet, le schéma classique de l’écran partagé par toute la famille a laissé place à une myriade d’écrans qui ne permet plus aux parents de contrôler efficacement les messages transmis et reçus.
Les études des spécialistes montrent cependant que les médias sont souvent un prolongement des formes de socialisation vécues avec les autres agents de socialisation. Ainsi, le partage des médias avec les groupes de pairs permet souvent de se confronter à d’autres, d’affirmer son identité et de travailler sur ses représentations sociales.
III. Une socialisation différentielle qui conduit à une socialisation différenciée
La socialisation différentielle, c’est le processus par lequel différents individus acquièrent des normes, des valeurs et ont des comportements différents. Nous allons tout d’abord analyser la socialisation différentielle selon le sexe de l’individu. Cela revient à se demander si on ‘éduque’ les filles de la même façon que les garçons. Mais nous allons plutôt employer la notion de genre. Puis, dans un deuxième temps, nous verrons que la socialisation n’est pas la même selon les milieux sociaux.
A. Une socialisation différentielle de genre
Le genre ? C’est quoi la différence entre sexe et genre en sociologie ? Le sexe est l’élément biologique qui différencie Homme/Femme, mais le genre est la construction sociale de l’identité sexuelle. Les sociologues du genre étudient la construction de l’identité d’un garçon et d’une fille, les persistances d’inégalité sociale ou même économique. Ainsi, on a constaté qu’à même niveau de diplôme, les rémunérations sont souvent plus faibles pour les femmes que pour les hommes.
La socialisation genrée repose en partie sur des stéréotypes, c’est-à-dire une opinion partagée par un groupe d’individus et qui fait office de jugement. Les stéréotypes peuvent amener à discriminer un groupe de personnes par simple préjugé. Amuse-toi à vérifier les préjugés au sein de ta famille. Michelle Obama a dit : « Il est tentant de s’accrocher à ses stéréotypes, on se sent ainsi rassuré dans sa propre ignorance. »
Ainsi, les multiples travaux des sociologues qui se sont penchés sur ce sujet ont montré que les rôles attendus des garçons et des filles sont souvent différents. Le rôle c’est l’ensemble des comportements attendus d’un individu selon sa position sociale ou, dit autrement, selon son statut dans le groupe auquel il appartient.
Cette socialisation genrée a deux conséquences lourdes de sens dans la vie future des hommes et des femmes :
– Une répartition sexuelle des tâches dans les ménages qui se fait au détriment des femmes.
– Une poursuite d’études et des métiers différenciés selon le sexe.
B. Une socialisation différentielle selon le milieu social
Les pratiques sociales sont différentes selon les milieux familiaux. Ainsi, les jeux proposés par les parents, les niveaux de diplômes des parents (norme) influencent la scolarité des enfants et cela aura bien sûr un impact sur la scolarité de l’enfant. Si cela t’intéresse, on approfondit ce point en SES en première.
Nous arrivons à la fin de ce thème consacré à la socialisation, et tu maîtrises maintenant ce processus qui amène les individus à intérioriser des normes et des valeurs. Tu connais le rôle pendant la socialisation primaire de la famille, de l’école, des médias et du groupe des pairs. Enfin, tu as repéré que la socialisation est différenciée. En première puis en terminale, on approfondit ce thème, qui permet d’expliquer certaines inégalités sociales. Alors si cela t’intéresse…
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MAJ avril 2024 @ Philippe Herry
Corrigé du cours
1) Tableau corrigé:des actes naturels ou culturels?
Acte naturel | Acte culturel | Exemples | |
parler | * | On reprend les expressions entendues dans notre entourage. Certains ont un langage châtié alors que d’autres utilisent toujours des mots familiers | |
chanter | * |
Le rythme, la hauteur, le phrasé … est lié au groupe auquel on appartient.
Quand chantons-nous? Les situations diffèrent selon les cultures. Par exemple, autrefois on chantait pour rythmer les travaux durs comme cela se fait encore dans certaines communautés.
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Manger | * |
Notre façon de manger est soumis à de multiples conventions: ne pas mettre les coudes sur la table, manger avec, une fourchette et un couteau, des baguettes ou sans ustensile, manger rapidement ou lentement, seul ou en groupe, …
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Pleurer | * |
On ne pleure pas pour les mêmes faits sociaux. Dans certaines sociétés d’Afrique de l’Est, on rit, on danse, on chante lors d’un décès. Cela permet d’accompagner l’âme du défunt. |
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Fonder une famille | * | Selon les sociétés, les modèles familiaux sont différents. Ainsi, la monogamie (du grec monos seul et gamos : mariage) est l’union conjugale la plus répandue. Pour autant, comme tu le sais, certaines sociétés reconnaissent la polygamie. On dit plus précisément la polygynie (du grec poly plusieurs et gynie femme), lorsque l’union conjugale permet à l’homme d’avoir plusieurs femmes. Dans certaines sociétés, comme dans des régions reculées du Tibet ou encore dans la communauté Tobas dans le sud de l’Inde, une femme peut avoir plusieurs époux, c’est la polyandrie (du grec andros homme). |
Tous les actes présentés dans le tableau sont culturels. Je te conseille un petit livre, écrit par un grand sociologue historien, Norbert Elias. Le livre s’intitule La civilisation des mœurs (1939). Il est facile à lire. Se moucher, déféquer, faire l’amour, … naturel ou culturel d’après toi?
2) Corrigé de l’exercice I. B
Quelques réponses possibles parmi beaucoup d´autres:
1) courage et ténacité/ respect de l’ordre établi et hiérarchie/ respect d’autrui et tolérance
2) courage et oisiveté/ liberté et respect de l’ordre établi/ égalité et séniorité
3) austérité et ne pas jouer de l’argent/ civisme et payer ses impôts/ fidélité et ne pas tromper son conjoint
it’s good !
votre leçon est très bien expliquée, je vous remercie énormément