s :L’utilisation des mathématiques en SES
À quoi servent les suites, les fonctions, les intégrales, les probabilités en Sciences économiques et sociales ? Nous allons tenter ci-dessous de répondre à ces interrogations.
1) Les taux de variation (t), multiplicateurs (cm) et indices (I)
-> Les calculs
Le b.a.-ba des premiers calculs en SES, mais aussi dans la vie de tous les jours…
On nommera la valeur d’arrivée → va et la valeur de départ → vd
Les formules :
taux de variation t = ((va-vd) / vd) x 100
Coefficient multiplicateur cm : va / vd
Indices simples I = (va / vd) x 100
Le tableau ci-dessous rappelle les liens entre taux de variation, indice et coefficient multiplicateur.
t | cm | I | |
t | t = (cm – 1) x 100 | t = I – 100 | |
cm | cm= ( t/100) + 1 | cm = I / 100 | |
I | I = t + 100 | I = cm x 100 |
Petit exercice pour vérifier (réponse à la fin) : La population française comptabilisait environ 40 millions d’habitants au premier janvier 1901 et 67 millions au premier janvier 2018.
Questions :
1) Calculez le taux de variation de la population française entre ces 2 dates.
2.) Calculez le coefficient multiplicateur de l’évolution de la population française entre 1901 et 2011.
Remarque : derrière ce petit calcul tout simple, se cache toute l’Histoire de France du XXe siècle. La France a été terre d’accueil des Belges, Italiens, Grecs, Espagnols, Portugais, puis des pays du Maghreb, des autres pays d’Afrique et d’autres régions plus lointaines…
3) Considérant que 1901 correspond à la date de l’indice Base 100, donnez l’indice en 2018 correspondant à la population française.
-> Un indice particulier : l’IPC
Concernant les indices, tu dois te rappeler que l’INSEE, qui calcule l’inflation avec l’indice des prix à la consommation (IPC), prend en compte l’indice de Laspeyre-prix.
En effet, le plus souvent, on est confronté non pas à l’évolution d’une seule grandeur, mais de plusieurs grandeurs. Ainsi, pour calculer l’augmentation générale des prix dans un pays, autrement dit l’inflation, nous sommes obligés de prendre en considération l’évolution des prix des différents produits, mais aussi la quantité consommée de ces différents produits.
2) Les fonctions
Pour déterminer les causalités entre deux variables, et notamment le prix et la quantité, on utilise les fonctions.
En économie, les fonctions permettent donc de représenter l’évolution des coûts (moyens, marginaux) et des recettes (moyens, marginaux) et ainsi de repérer les profits (le maximum). Le signe de la dérivée permet de savoir si la fonction est croissante ou décroissante, par exemple si le coût est croissant, décroissant… On retrouve bien sûr en toile de fond les hypothèses de nos chères néo-classiques. Ainsi, on retrouve très souvent la loi des rendements décroissants. Plus je produis, plus la productivité baisse, dit autrement, le coût de production augmente.
On peut optimiser sous contrainte, c’est ce qu’on appelle la programmation linéaire pour un consommateur ou pour une entreprise.
Mais alors pourquoi introduire des fonctions plus complexes avec des logarithmes, des exponentielles, des inverses, des puissances… Parce que cela a du sens !
Les inverses expriment l’idée que plus X augmente, plus la valeur correspondante diminue. Ainsi, lorsque le temps augmente, beaucoup de prix d’objets diminuent : donc f(p) = p x 1/t
Les logarithmes peuvent exprimer l’idée que plus le pouvoir d’achat augmente, plus la satisfaction retirée d’une consommation se réduit.
3) Les élasticités
L’élasticité permet de mesurer la variation d’une grandeur-effet provoquée par la variation d’une grandeur-cause : Nous mesurons ainsi des variations d’une demande ou d’une offre qui sont la cause soit de la variation du prix, soit de la variation du revenu.
J’ai écrit un article sur cet outil qui a de nombreuses utilités en économie.
4) Les probabilités
Les probabilités permettent de modéliser différents phénomènes. Par exemple, quelle est la pratique du vote des ouvriers ? cadres ? agriculteurs ? … Ensuite, les résultats des élections permettent de vérifier statistiquement la validité du modèle.
Plus couramment, on vous fait travailler différemment en sociologie et en économie.
En sociologie, c’est le règne des sondages par excellence. Quelle est la prévision d’un vote ? Avec quel pourcentage d’erreur ?
En économie, les probabilités permettent de mesurer la marge d’erreur, autrement dit la fiabilité d’un résultat. Il est probable que…
Les probabilités jouent donc un rôle clé pour prendre en compte l’incertitude ou la confiance qui est par nature incertaine. Depuis J.M. Keynes, nous savons que la confiance joue un rôle déterminant en économie.
Dès qu’un modèle économique prend en compte la confiance des acteurs économiques ou encore l’incertitude d’un résultat, il est nécessaire de prendre en compte les lois de la probabilité.
5) Les statistiques
Comme nous l’avons dit ci-dessus, les statistiques permettent de vérifier la validité des modèles.
On vous donne à traiter plus souvent certains thèmes que d’autres.
En économie, le domaine de prédilection des statistiques concerne la répartition des revenus et donc les thèmes égalité, inégalité, justice sociale…
En sociologie, on retrouve les statistiques dès que l’on utilise des méthodes quantitatives. Réaliser des sondages nécessite souvent de calculer la moyenne, les écarts type…
-> Les séries statistiques simples
On s’intéresse à une population considérée à un caractère. Par exemple, l’écart des revenus en France, ou bien le taux de chômage, le nombre de diplômés. Très souvent en SES, on compare les résultats entre plusieurs populations. Par exemple, l’inégalité des revenus en France, en Espagne, aux États-Unis et en Suède.
Les séries statistiques simples peuvent t’amener à calculer les moyennes, les écarts type, ou encore lorsqu’on traite par exemple des inégalités, les médianes ou les quartiles. Je ne vais pas plus loin. Juste un mot sur l’écart type.
L’écart type mesure la dispersion des données. Un écart type nous donne finalement « la moyenne des carrés moins le carré de la moyenne ». Tu sais, c’est la formule que tu as apprise par cœur en mathématiques :-). S’il est faible, les données sont très resserrées, autrement dit il y a une masse importante de personnes autour de la moyenne. Inversement, si l’écart type est élevé, alors les données sont très dispersées.
Remarque : pour une série statistique de notes sur 20, on peut considérer qu’un petit écart type est de l’ordre de 2 alors qu’un ordre de 4 nous donne un grand écart type.
-> Les séries statistiques doubles
Lorsqu’on étudie deux caractères pour une population donnée, alors on s’intéresse à des statistiques à deux variables, autrement dit des séries statistiques doubles. Comme tu sais, en SES, on retrouve souvent ce type de série. On a souvent des tableaux à double entrée et on te demande alors d’analyser le document pour repérer s’il y a des corrélations entre les deux caractères. Dès la seconde, par exemple, on tente de repérer les liens entre taux de chômage et niveau de diplôme. Il y a une réelle corrélation et tout l’intérêt est d’interpréter les résultats avec notamment un regard sociologique.
Les mathématiques sont très intéressantes pour repérer s’il y a une réelle corrélation entre deux variables. Cela se fait avec la fameuse droite de régression ou encore avec le test du X²
Un mot sur la droite de régression. Une illustration très souvent utilisée pour repérer les liens entre deux variables, c’est le nuage de point. Pour savoir si on peut retrouver un lien entre les variables, il faut alors vérifier si on peut retrouver la fameuse droite de régression.
Un mot sur le test du X²
En économie, le test du X² peut avoir plusieurs usages.
-> Il permet de tester l’indépendance entre 2 variables aléatoires.
Par exemple, si la variable 1 est le salaire et la variable 2 le sexe, alors on pourra se demander s’il y a corrélation entre le niveau de salaire et le fait d’être un homme ou une femme.
Voir le problème. Wikipédia test du X² très bien fait
→ Le test du X² permet de juger l’hypothèse qu’une série de données statistiques suit une certaine loi de probabilité.
Exemple sur un sondage. Si on interroge 1000 personnes qui votent, peut-on alors faire l’hypothèse que le vote de la population suit une loi déterminée ?
6) Les suites
En SES, les suites sont utilisées pour deux approches. On peut les utiliser pour modéliser un phénomène. Par exemple, si une ville grandit de tant d’habitants par an, modéliser la fonction de croissance démographique pour repérer le nombre d’habitants dans 5 ans, 10 ans,… On peut aussi les utiliser pour les calculs financiers. C’est alors l’outil des taux d’intérêt simples ou composés…
Avant de se pencher sur les taux d’intérêt, on rappellera qu’il existe de nombreux exercices micro ou macro où le taux de croissance à taux constant est assimilé à une suite.
Par exemple : un appartement vaut 150 000 euros et augmente chaque année d’un taux réel de 3 %. Augmentation en 5 ans
Combien d’années pour le doublement de sa valeur ?
Autre exemple : il vaut 150 000 euros en 2005 et 200 000 euros en 2010. Quel est le taux de croissance annuel supposé constant sur la période ?
Autre exemple : cet appartement de 150 000 euros augmente de 3 % puis 5 % puis 2 % enfin 4 %. Quel est son taux de croissance annuel moyen (TCAM) ?
Les suites sont l’outil déterminant pour les calculs de capitaux simples et composés.
-> les capitaux à taux d’intérêt simple
Les placements d’une durée inférieure à un an ont généralement des intérêts simples. Le taux annuel est désigné comme le taux nominal ou le taux facial. S’il y a besoin de calculer le taux d’intérêt mensuel correspondant, par exemple, on sait qu’il faut calculer le taux périodique.
Le taux périodique est un taux proportionnel si ce taux appliqué à un calcul d’intérêts simple sur toutes les périodes de l’année donne le même résultat que le taux annuel.
Formule générale :
Taux périodique proportionnel = taux nominal × durée de la période / durée de l’année.
Exemple :
– Taux proportionnel mensuel pour un taux annuel de 6 % : 0,06 x 1 mois sur 12 mois = 0,5 %.
– Taux proportionnel pour la période du 1/1/2005 au 15/2/2005 pour un taux annuel de 10 % :
0,10 ×46 jours/365 jours = 1,26 %
-> les capitaux à taux d’intérêt composés
Les intérêts des placements de plus d’un an sont des intérêts composés. Le taux annuel est appelé taux actuariel ou taux équivalent. Voir l’article de lafinancepourtous.
7) Les matrices : l’outil des graphes et, plus précisément, des graphes probabilistes
Il peut être intéressant de repérer les évolutions des comportements des individus.
Il faut déterminer le graphe puis la matrice correspondante. On peut alors :
1. Traduire l’évolution d’un État probabiliste par un graphe
2. Déterminer l’État stable
La programmation linéaire peut amener à résoudre un système de fonctions que l’on peut assimiler à une matrice. D’où la recherche du pivot de Gauss (si on ne peut pas utiliser la calculatrice).
Je ne vais pas plus loin, car cela concerne plutôt les études post-bac et non les SES au lycée.
8) Les intégrales
L’intégrale est l’outil par excellence qui permet le calcul des aires.
En économie, cela peut se rapporter à plusieurs thèmes.
Concernant le thème des inégalités et de la répartition des revenus. On peut être amené à calculer un coefficient de Gini.
Les intégrales peuvent être utilisées pour la notion de surplus.
Cela peut concerner les surplus du consommateur ou encore les calculs de surplus lorsqu’on veut repérer un optimum de pollution.
Cet article permet de montrer ce qu’apporte l’outil mathématique au raisonnement en économie, sociologie, science politique. Bien sûr, les statistiques, et tu le savais, sont indispensables, notamment pour les enquêtes. Mais les probabilités, les intégrales, les suites et les matrices ont aussi beaucoup d’intérêt. Mieux comprendre l’intérêt des mathématiques en SES, cela donne du sens aux apprentissages et motive à faire les efforts indispensables pour maîtriser les outils mathématiques.
MAJ août 2024 @ Philippe Herry
Correction du petit exercice du 1)
1) J’utilise la formule du taux de variation : ((67 – 40)/40) x 100 = 67.5 Autrement dit, la population française a augmenté de 67,5 % entre 1901 et 2018.
2) Elle a été multipliée par 1,67.
3) Cela équivaut à un indice 167,5 en 2018 pour un indice 100 en 1901.
Remarque : Pour donner du sens à un indice, il faut le traduire en % ou en indice. Ainsi, dire que la population française est passée de l’indice 100 en 1901 à 167,5 en 2018 signifie que la population française a augmenté de 67,5 % (lorsque les chiffres sont inférieurs à 100 %, on utilisera de préférence les %, puis après les coefficients multiplicateurs).